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A quand un accord CH-UE dans le domaine de l’électricité ?

Diane Grisel , 24 janvier 2011

La Suisse et l’Union européenne ont eu l’occasion, en marge du 5ème Congrès suisse de l’électricité qui s’est tenu à Berne les 10 et 11 janvier 2011, de faire le point sur l’état d’avancement des négociations en cours sur la conclusion d’un accord bilatéral dans le domaine de l’électricité.

Un accord Suisse-UE dans ce domaine permettrait de garantir l’approvisionnement des marchés dans un contexte de libéralisation. Depuis le lancement officiel des négociations en novembre 2007, trois cycles de négociations ont eu lieu, ainsi que des rencontres au niveau de groupes de travail constitués d’experts. Il s’agit de comparer le contexte juridique des marchés de l’électricité en Suisse et dans l’Union européenne afin d’en déterminer les différences et d’en éliminer les incompatibilités.

Invité à s’exprimer dans le cadre du Congrès suisse de l’électricité, le commissaire européen à l’énergie, Monsieur Günther Oettinger, a réaffirmé le souhait de l’Union européenne de voir la Suisse intégrer le marché intérieur européen de l’électricité. Le commissaire Oettinger a rappelé les conditions que la Suisse doit satisfaire avant de pouvoir bénéficier du grand marché européen et conserver sa position de plaque tournante du commerce de l’électricité, à savoir notamment reprendre intégralement l’acquis de l’Union dans ce domaine, accepter que les mêmes règles d'accès au marché qui s'appliqueront en Suisse et dans l'Union européenne reçoivent une interprétation uniforme et assurer le dynamisme de l'accord (discours du commissaire Günther Oettinger, du 11 janvier 2011).

Or, à l’heure actuelle, l’ouverture du marché de l’électricité en Suisse est en retard sur la libéralisation du marché européen, amorcée au milieu des années 90. Dans l’Union européenne (qui dispose depuis le 1er décembre 2009 d’une nouvelle compétence spécifique en matière d’énergie à l’article 194 du traité FUE), tous les clients peuvent choisir leur fournisseur d’électricité depuis 2007. En Suisse, en vertu de la loi sur l’approvisionnement en électricité (LApEI, RS 734.7), seuls les clients dont la consommation est importante (plus de 100 MWh par an) bénéficient d’un droit d’accès libre au réseau depuis 2009. La seconde étape de la libéralisation du marché suisse de l’électricité débutera cinq ans après l’entrée en vigueur de LApEI, soit en 2014 ; le libre choix du fournisseur sera alors étendu à l’ensemble des utilisateurs.

Le retard de la Suisse sur l’Union européenne en matière de libéralisation du marché de l’électricité va encore s’accentuer à partir du 3 mars 2011, date à laquelle sera mis en oeuvre le troisième paquet de mesures de libéralisation dans l’Union. La directive 2003/54 sera alors remplacée par la directive 2009/72 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, dont les objectifs sont multiples : l’établissement de règles d’organisation du secteur définissant des obligations de service public et des mesures de protection des consommateurs, lesquelles concernent autant l’information du consommateur, notamment en matière d’impact environnemental des sources d’énergie utilisées, que les facilités contractuelles de changer de fournisseur ; la séparation effective des activités de fourniture et de production d’électricité d’une part et de gestion des réseaux d’autre part ; l’amélioration du fonctionnement du marché, notamment en renforçant la transparence afin que les acteurs du marché aient un accès égal aux informations pertinentes ; le renforcement de la sécurité d’approvisionnement en développant les interconnexions transfrontalières ; le renforcement des régulateurs nationaux pour superviser le fonctionnement des marchés de l’électricité. Le troisième paquet de mesures de libéralisation prévoit également la création d’une agence de coopération des régulateurs de l’énergie, qui permettra de mieux gérer les situations transnationales, par exemple en matière d’échanges d’informations, et de disposer d’une surveillance réglementaire des gestionnaires de réseau de transport d’électricité (règlement n° 713/2009). De plus, il est prévu la création d’un réseau européen des gestionnaires de réseau de transport pour l’électricité («le REGRT pour l’électricité»), destiné à renforcer la coopération et la coordination entre les gestionnaires de réseau de transport, notamment en créant des codes de réseau veillant, entre autres, à assurer la sécurité et la fiabilité du réseau et l’accès des tiers.

Au vu des développements législatifs dans l’Union européenne, le Conseil fédéral a étendu le mandat de négociation pour la conclusion d’un accord sur l’énergie avec l’UE (extension décidée le 12 mai 2010 et confirmée, après consultation des cantons et des commissions de politique extérieure des Chambres fédérales, le 17 septembre 2010). Cette extension vise notamment à permettre à la Suisse d’accéder à l’agence de coopération des régulateurs de l’énergie et au réseau des gestionnaires de réseau de transport, ainsi qu’à intégrer dans les négociations la nouvelle directive relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dont le délai de transposition dans les Etats membres est arrivé à échéance le 5 décembre 2010 (directive 2009/28). Si elle entend reprendre cette directive, la Suisse devra fixer un objectif national définissant la part d’énergie issue de sources renouvelables que devra comporter sa consommation d’énergie finale brute d’ici 2020.


Reproduction autorisée avec l’indication: Grisel Diane, "A quand un accord CH-UE dans le domaine de l’électricité ?", www.ceje.ch, actualité du 24/1/2011.