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Le nouveau code des douanes communautaire remet l’accord bilatéral de 1990 sur le tapis des négociations entre la Suisse et l’Union européenne

Eléonore Maitre , 19 septembre 2007

Suite aux attentats du 11 septembre 2001, le Parlement européen et le Conseil ont modifié, le 13 avril 2005, le règlement communautaire n° 2913/92 établissant le code des douanes communautaire, instaurant ainsi un durcissement du contrôle des marchandises lors de l’entrée sur le territoire douanier de la Communauté. Ne faisant pas partie de l’Union européenne (UE), la Suisse est touchée de plein fouet par ces modifications qui risqueraient de prolonger la durée de dédouanement aux frontières helvétiques, et par conséquent d’entraver fortement la circulation transfrontalière des marchandises.

La principale modification prévue par le règlement modificatif n° 648/2005 (PDF) est l’instauration d’une déclaration préalable au franchissement des frontières des Etats membres de l’UE des marchandises en provenance d’Etats tiers. Cette nouvelle règle dite ‘règle des 24 heures’, exigera que toutes les marchandises introduites sur le territoire douanier de la Communauté soient déclarées préalablement à leur arrivée aux frontières des Etats membres, et ce dans un délai qui devrait varier entre vingt-quatre heures pour le transport maritime et une heure pour le transport routier (voir ci-dessous). Seuls bénéficiaires de facilités à l’entrée sur le territoire douanier de la Communauté, les opérateurs économiques agréés sont, au terme de l’article 5 bis du règlement, les opérateurs économiques établis « sur le territoire douanier de la Communauté » et qui répondent aux critères listés à son paragraphe 2. Les dispositions d’application fixant la procédure de demande préalable édictées par la Commission sous forme d’un règlement (PDF) sont entrées en vigueur le 26 décembre 2006, mais l’obligation de soumettre cette demande n’entrera en vigueur qu’à partir de juillet 2009.

La voie bilatérale ne permettant évidemment pas aux opérateurs économiques établis en Suisse de se prévaloir des conditions favorables applicables à leurs concurrents établis dans un Etat membre, les premiers doivent donc se plier à ladite règle des 24 heures. Or, une telle situation créera, si elle est appliquée telle quelle, une entrave aux relations économiques entre la Suisse et l’UE, alors même que les deux partenaires ont travaillé pendant des années à l’élimination de ce type d’obstructions sur la base d’un accord bilatéral sur le transport des marchandises du 21 octobre 1990. D’ici à la mise en application effective de cette nouvelle exigence, l’accord bilatéral susmentionné liant la Suisse et l’UE devra être adapté afin d’éviter une entrave importante à la circulation transfrontalière. Un premier cycle de négociations a d’ores et déjà été entamé en juillet dernier et devrait se poursuivre après la pause estivale.

Hermann Kästli, membre de la Direction générale des douanes, a été nommé par le Conseil fédéral pour négocier ce dossier. Dès le mois de juillet dernier, celui-ci s’est attelé à une tâche que l’on aurait pu croire, à tort, être une simple formalité juridico-politique. En effet, les premiers échanges ont laissé apparaître qu’il est moins évident pour l’UE que la Suisse se voie reconnaître un statut identique à celui d’un Etat membre que cela ne semble être le cas du point de vue helvétique. A Berne, on se serait étonné du refus de l’UE de traiter la Suisse comme un Etat tiers, statut qu’elle revendique pourtant habituellement, tandis que Bruxelles semble afficher son intention de ne plus considérer la Suisse comme un Etat candidat à l’adhésion, mais comme un Etat tiers au même titre que les autres. Interrompues par la pause estivale, les négociations devraient reprendre très prochainement, il convient donc de faire un tour d’horizon des options qui nous semblent envisageables, et des avantages et inconvénients que chacune d’elles présenterait.

Une première option serait pour la Suisse de se voir reconnaître par l’UE une équivalence entre les contrôles effectués par les douanes suisses à la sortie des marchandises du territoire et ceux effectués par les douanes européennes à l’entrée de ces mêmes marchandises sur le territoire de la Communauté. Cette solution offrirait l’avantage d’éviter un double contrôle aux frontières, de ne pas alourdir les frais supportés de part et d’autre des frontières et reviendrait à privilégier une solution à la fois rationnelle et efficace. Toutefois, les règles et normes qui seraient imposées par Bruxelles pour la reconnaissance des contrôles effectués par les douaniers suisses risqueraient de les rendre plus laborieux et d’aboutir finalement à une augmentation similaire de la durée nécessaire au franchissement des frontières.

Une deuxième option consisterait à reconnaître aux transporteurs ayant effectués les déclarations préalables par voie électronique un droit de franchissement des frontières prioritaire. Cette hypothèse suivrait de manière adéquate la tendance actuelle qui va vers une utilisation accrue des outils électroniques, mais ne remplacerait pas le mécanisme de la demande préalable.

Enfin, une troisième option pourrait être de reconnaître aux opérateurs économiques établis en Suisse le statut d’opérateurs économiques agréés tels que définis dans le nouveau code des douanes. Il s’agirait ainsi de permettre aux entreprises établies en Suisse, et plus spécifiquement celles actives dans les zones de frontières, de bénéficier d’un allègement des formalités douanières et donc d’une facilitation de l’entrée de leurs marchandises dans le territoire des Etats membres à peu près égale à ce qui existait jusque-là. Néanmoins, cette solution semble, au vu des premières négociations et de l’intransigeance de l’UE, ne plus être une hypothèse plausible. Si un telle solution devait toutefois rester envisageable, les conditions et démarches administratives qui pourraient être exigées des entreprises établies en Suisse pour se voir reconnaître le statut convoité d’opérateur économique agréé risqueraient fort de ne pas faire beaucoup d’élus.


Récapitulatif de l’article 184 bis du règlement n° 1875/2006 de la Commission :

Transport maritime :

  • pour les cargaisons conteneurisées, au moins vingt-quatre heures avant le chargement dans le port de départ ;
  • pour les cargaisons en vrac/fractionnées, au moins quatre heures avant l’arrivée au premier port situé sur le territoire douanier de la Communauté.

Transport aérien :

  • pour les vols court-courriers, au plus tard au moment du décollage effectif de l’aéronef ;
  • pour les vols long-courriers, au moins quatre heures.

Transport ferroviaire et de transport par les eaux intérieures :

  • au moins deux heures avant l’arrivée au bureau de douane d’entrée dans le territoire douanier de la Communauté.

Transport routier :

  • au moins une heure avant l’arrivée au bureau de douane d’entrée dans le territoire douanier de la Communauté.

Reproduction autorisée avec indication : Eléonore Maitre, "Le nouveau code des douanes communautaire remet l’accord bilatéral de 1990 sur le tapis des négociations entre la Suisse et l’Union européenne", www.ceje.ch, actualité du 19 septembre 2007.