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Accords verticaux et droit de la concurrence : nouvelles règles en Europe et en Suisse

Julia Xoudis , 26 juillet 2010

Deux nouveaux règlements européens sont entrés en vigueur le 1er juin 2010 : le règlement n° 330/2010 relatif au régime général en matière d’accords verticaux et le règlement n° 461/2010 relatif à la distribution automobile. Dans la foulée, la Commission de la concurrence suisse a adopté une nouvelle Communication sur les accords verticaux, qui entrera en vigueur le 1er août 2010. Elle vient aussi de modifier la Note explicative relative à la Communication sur la distribution automobile.

Le règlement n° 330/2010 sur les accords verticaux remplace le règlement n 2790/1999. Il est accompagné de nouvelles lignes directrices. Une phase transitoire d’une année est prévue pour les accords en vigueur le 31 mai 2010. Le règlement n 330/2010 innove afin de tenir compte de la puissance d’achat de la grande distribution : l’exemption ne s’applique que pour autant que le seuil de 30% du marché ne soit dépassé ni par le fournisseur ni par l’acheteur (art. 3). Pour le reste et sous réserve de certaines précisions, les grands principes restent inchangés : l’exemption n’est accordée que si les accords ne contiennent pas de restrictions caractérisées liées au prix, au territoire ou à la clientèle de vente (art. 4) ; elle ne s’applique pas à certaines restrictions limitant la concurrence entre les marques (art. 5). Les lignes directrices apportent du nouveau surtout en matière de ventes en ligne et de commerce transfrontalier (points 51 ss). Dans le cadre de la distribution exclusive, sont notamment prohibés les accords imposant un refus de vendre à des clients non établis sur le territoire concédé ou empêchant ces derniers de consulter le site internet du distributeur, en particulier par un renvoi automatique vers d’autres sites (restrictions de ventes passives caractérisées). Dans un système de distribution sélective, le fournisseur peut exiger que ses distributeurs disposent d’un ou de plusieurs points de vente physiques, mais ne peut limiter les quantités vendues par internet, que ces ventes soient passives ou actives. De manière générale, un fournisseur ne peut pratiquer des prix plus élevés pour les produits destinés à être vendus par internet. Les lignes directrices précisent par ailleurs les conditions pouvant être imposées à la vente en ligne.

Le règlement n° 461/2010 et les lignes directrices supplémentaires distinguent entre le marché de la vente de véhicules automobiles neufs et les marchés de l’après-vente automobile. La distribution de voitures neuves continue d’être régie par le règlement n° 1400/2002 et la brochure explicative jusqu’au 31 mai 2013. Après cette date, le régime sectoriel sera abandonné et la distribution de voitures neuves sera soumise au règlement n° 330/2010, soit au régime général en matière d’accords verticaux complété par les précisions apportées par les lignes directrices supplémentaires. Dans le domaine de l’après-vente automobile, le règlement n° 461/2010 et les lignes directrices qui l’accompagnent introduisent des règles immédiatement applicables. Pour être exemptés, les accords verticaux relatifs à l’achat, la vente ou la revente de pièces de rechange et ceux relatifs à la fourniture des services de réparation et d’entretien doivent satisfaire aux conditions prévues tant par le règlement n° 330/2010 que le règlement n° 461/2010. De manière générale, le nouveau régime a pour objectif de renforcer la concurrence au niveau du service après-vente, notamment en facilitant l’obtention de pièces de rechange et l’utilisation de pièces détachées d’autres marques, en permettant aux opérateurs indépendants d’accéder aux informations techniques nécessaires à la réparation et en combattant certaines pratiques ayant pour but d’évincer les réparateurs indépendants du service après-vente.

Sur le plan du droit suisse, la Commission de la concurrence a adopté le 28 juin 2010 une nouvelle Communication concernant l’appréciation des accords verticaux, qui remplace celle du 2 juillet 2007. L’entrée en vigueur a été fixée au 1er août 2010, avec une période transitoire d’une année (ch. 19). Le nouveau régime tient compte de l’évolution du droit européen. Ainsi, la nouvelle Communication reprend les modifications majeures introduites par le règlement n° 330/2010, en particulier le seuil de 30% applicable aussi à la part de marché détenue par l’acheteur (ch. 16/2). Elle encourage également le développement des ventes par internet en les qualifiant de ventes passives, sauf si les efforts de vente visent à atteindre des clients établis hors du territoire concédé (ch. 3) ; une interdiction de ventes passives est présumée supprimer la concurrence efficace et peut entraîner de lourdes amendes (ch. 10/1 ; art. 5 al. 4 et art. 49a LCart). De manière plus générale, les règles ont été adaptées afin de refléter celles du droit européen, notamment en matière de distribution duale (ch. 8/2 - voir l’art. 2/4 du règlement n° 330/2010), de restrictions notables de la concurrence (ch. 12/2 - voir les art. 4 et 5 du règlement n° 330/2010) et d’accords n’affectant pas de manière notable la concurrence (ch. 13 - voir Communication européenne sur les accords d’importance mineure). La nouvelle Communication tient également compte de la pratique récente de la Commission de la concurrence en matière d’accords verticaux ; il est renvoyé aux affaires Sécateurs et cisailles (DPC 2009/2 143), Gaba (DPC 2010/1 65) et Médicaments hors-liste. En particulier, les cas relevant de l’art. 5 al. 4 LCart et sanctionnés de l’amende ont été précisés (ch. 10) ; il en va de même des circonstances permettant de renverser la présomption de suppression de la concurrence efficace, qui dépendent du degré de concurrence intramarque et/ou intermarques (ch. 11). Enfin, les règles sur les recommandations de prix ont été revues ; elles sont désormais plus en harmonie avec les règles européennes (ch. 10/3 et ch. 12/2 let. a - voir l’art. 4 let. a du règlement n° 330/2010), même si la Communication retient des hypothèses particulières pouvant donner lieu à l’examen de telles recommandations (ch. 15/3).

Le 20 juillet 2010, la Commission suisse de la concurrence a publié sur son site internet une nouvelle version de la Note explicative se rapportant à la Communication concernant les accords verticaux dans le domaine de la distribution automobile datée du 21 octobre 2002. La Communication reste pour le moment inchangée, mais la Commission va consulter les acteurs du marché afin de déterminer s’il convient de l’adapter pour tenir compte de la réglementation européenne qui entrera en vigueur en juin 2013. La Note explicative révisée tient compte des modifications intervenues sur le plan européen, notamment en renforçant la position des réparateurs indépendants relativement à l’approvisionnement en pièces de rechange et à l’accès aux informations techniques (ch. 15). Elle apporte aussi des précisions par rapport aux voies de droit en matière de réclamations fondées sur la garantie du constructeur (ch. 5), aux conditions d’admission au réseau des réparateurs agréés (ch. 6), aux revendeurs mandatés (ch. 14) et à la résiliation des contrats (ch. 17). Enfin, la Commission rappelle que l’art. 5 al. 4 LCart et les sanctions qui y sont liées (art. 49a LCart) sont applicables à l’imposition d’un prix de vente minimum ou fixe et à la protection territoriale absolue et indique qu’elle analysera ces hypothèses à la lumière de la Communication générale sur les accords verticaux (ch. 11).


Reproduction autorisée avec indication : Julia Xoudis, "Accords verticaux et droit de la concurrence : nouvelles règles en Europe et en Suisse", www.ceje.ch, actualité du 26 juillet 2010.

Catégorie: Concurrence