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Droit pénal européen : violation des mesures restrictives en tant que domaine de criminalité prévu à l’article 83 TFUE

Sara Notario , 17 février 2023

Le 28 novembre 2022, le Conseil de l’Union européenne a adopté la décision (UE) 2022/2332 relative à l’identification de la violation des mesures restrictives de l’Union, adoptées sur la base des articles 29 TUE et 215 TFUE, en tant que domaine de criminalité qui remplit des critères visés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE.

L’article 83, paragraphe 1, deuxième alinéa, TFUE prévoit les domaines de criminalité suivants : le terrorisme, la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic illicite des drogues, le trafic illicite d’armes, le blanchiment d’argent, la corruption, la contrefaçon de moyens de paiement, la criminalité informatique et la criminalité organisée. La décision en cause a été adoptée sur la base de l’article 83, paragraphe 1, troisième alinéa, TFUE octroyant au Conseil le pouvoir d’adopter une décision à l’unanimité avec l’approbation du Parlement européen afin d’identifier d’autres domaines de criminalité et les inscrire dans la liste d’infractions pénales prévue au premier alinéa de la même disposition. En l’espèce, le Conseil a considéré que la violation des mesures restrictives remplit les critères prévus au paragraphe 1 de l’article 83 TFUE en raison de la gravité et de la dimension transfrontalière de l’infraction commise. En vertu du protocole n° 22, le Danemark a décidé de ne pas participer à l’adoption de cette décision. L’Irlande, au contraire, a notifié son souhait d’y participer conformément à l’article 3 du protocole n˚ 21.

La décision (UE) 2022/2332, en créant un lien direct entre la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et l’Espace de liberté, de sécurité et de justice (ELSJ), précise dans son préambule (cons. 3) qu’elle ne vise que les mesures restrictives adoptées par l’Union européenne telles que le gel de fonds et de ressources économiques, l’interdiction de mise à disposition de fonds et de ressources économiques et l’interdiction d’entrée sur le territoire d’un Etat membre de l’Union, des mesures économiques sectorielles et des embargos sur les armes. La situation en Ukraine a joué un rôle considérable dans cette avancée du droit pénal européen. En particulier, le caractère exceptionnel de la procédure spéciale visée à l’article 83, paragraphe 1, troisième alinéa, TFUE, reflète les circonstances exceptionnelles de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine (cons. 7). L’entrée en vigueur de cette décision est aussi réalisée « de toute urgence » (cons. 24) le jour suivant celui de sa publication dans le Journal officiel de l’UE (art. 2 de la décision 2019/2332).

La violation des mesures restrictives est déjà érigée en infraction pénale dans la majorité des États membres. Toutefois, des divergences persistent au niveau de sa définition et son application en vertu du droit national. Afin de promouvoir une action cohérente au niveau de l’Union ainsi que d’éviter que les personnes et entités visées par les mesures restrictives puissent se tourner vers la juridiction la plus favorable (celle qui prévoirait les sanctions moins sévères), le 2 décembre 2022, la Commission européenne a proposé, en vertu de l’article 83, paragraphe 1, TFUE, une directive pour fixer des règles minimales définissant les infractions pénales et sanctions en cas de violation des mesures restrictives de l’UE. Cette directive fait actuellement l’objet de débats entre les deux co-législateurs.

Sara Notario, Droit pénal européen : violation des mesures restrictives en tant que domaine de criminalité prévu à l’article 83 TFUE, actualité du CEJE n° 5/2023, 17 février 2023, disponible sur www.ceje.ch.